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L’Allemagne dit au revoir à Angela Merkel

La chancelière Angela Merkel a fait hier ses adieux aux Allemands lors d'une cérémonie d'hommage qui lui a été rendu par la Bundeswehr après 16 années passées au pouvoir, © picture alliance/dpa/AFP POOL | Odd Andersen
La chancelière a reçu hier soir à Berlin l’hommage traditionnel du « Großer Zapfenstreich », le plus haut hommage militaire réservé aux civils. Une cérémonie solennelle en forme d’au revoir pour honorer les 16 années qu’elle a passées à la tête du gouvernement allemand.
A quelques jours près, elle n’a pas battu le record de longévité d’Helmut Kohl à la chancellerie. Mais après 16 années à la tête du gouvernement fédéral, la chancelière Angela Merkel tourne une page historique en quittant ses fonctions la semaine prochaine. Hier soir, à Berlin, la Bundeswehr lui a rendu l’hommage solennel du « Großer Zapfenstreich », la plus haute cérémonie militaire réservées aux civils. Une cérémonie en forme d’au revoir.
Angela Merkel a pris la parole pour une brève allocution. Sept minutes à la lueur des flambeaux, dans la nuit berlinoise, durant lesquelles elle n’a pas dérogé à sa simplicité coutumière. Elle a remercié les ministres de ses quatre gouvernements, ses collaborateurs et ses proches. Elle a dit « son humilité devant la fonction que j’ai eu le privilège d’exercer si longtemps » et sa « gratitude pour la confiance dont j’ai bénéficié. »
Leçons de 16 années jalonnées de crises
Angela Merkel a évoqué seize années « bien remplies » et « exigeantes » depuis son accession à la chancellerie en 2005. Crise financière de 2008, crise des dettes souveraines, crise migratoire, crise sanitaire : ses mandats ont été jalonnés de défis comme peu d’autres. Ces crises ont fait apparaître l’importance de la coopération internationale, a-t-elle souligné.
Face à la crise sanitaire, la chancelière en exercice a remercié l’ensemble des médecins, des soignants, des équipes de vaccination, des assistants de la Bundeswehr et des ONG. Cette crise a révélé à quel point la confiance dans la politique est importante.
La démocratie est fragile, a-t-elle ajouté. Elle se nourrit de la capacité à mener des débats critiques et à se corriger. La tolérance des démocrates trouve sa limite là où la haine et la violence servent à imposer des intérêts particuliers.
« Au travail avec un cœur joyeux »
A son successeur désigné, Olaf Scholz, elle a souhaité une pleine réussite. Nous pouvons façonner un bel avenir si « nous nous mettons au travail avec un cœur joyeux », a-t-elle affirmé. C’est ainsi qu’elle a toujours agielle-même, a-t-elle dit, durant sa vie en RDA « et a fortiori depuis qu’[elle] vit dans la liberté ».

Le cérémonial du « Großer Zapfenstreich », utilisé pour rendre hommage aux chanceliers, présidents fédéraux, ministres de la Défense ou hauts gradés en fin de mandat, répond à un ordonnancement très rigoureux. Ses origines remontent au XVIe siècle. Il existe Sous sa forme actuelle depuis 1838. La cérémonie se déroule nécessairement au crépuscule, à la lumière des flambeaux. Elle s’ouvre et se conclut par un défilé militaire. Entre les deux, elle se compose de plusieurs morceaux de musique, dont l’hymne national.
Comme ses prédécesseurs, Angela Merkel avait eu le droit de choisir trois des morceaux joués par l’orchestre de la Bundeswehr. Elle a jeté son dévolu sur le cantique « Groß Gott, wir loben dich » et la chanson « Für mich soll’s rote Rosen regnen » (« Il doit pleuvoir des roses rouges pour moi ») d’Hildegard Knef. Première femme et première Allemande de l’Est à accéder à la chancellerie, elle a également opté pour le succès punk de Nina Hagen « Du hast den Farbfilm vergessen » (« Tu as oublié le film en couleur », 1974). Une chanson qui évoquait la monotonie de la vie en RDA.
Même si son choix a quelque peu surpris le chef d’orchestre de la Bundeswehr, les partitions des deux derniers titres ne figurant pas dans le répertoire de l’armée allemande, la chancelière s’est inscrite dans le sillage d’une évolution observée depuis une vingtaine d’années. L’ancien président Christian Wulff avait ainsi fait jouer la chanson « Over The Rainbow » de Judy Garland et son successeur Joachim Gauck un titre rock de la RDA, « Über sieben Brücken musst du gehen ». L’ancien chancelier Gerhard Schröder, quant à lui, avait fait interpréter « Summertime » de l’opéra « Porgy and Bess » de George Gerschwin et la « Complainte de Mackie Messer » de Kurt Weill, composée pour l’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht. Pour finir, les Allemands se souviennent des larmes qu’il avait versées sur le dernier titre, « My Way » de Frank Sinatra.
A.L.