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Faire avancer l’analyse du passé colonial de l’Allemagne

Des femmes de la tribu Herero en Namibie, © picture alliance/dpa
Un nouveau programme de bourses du DAAD soutient la recherche sur l’histoire coloniale allemande.
L’analyse de l’histoire coloniale de l’Allemagne était jusque-là sous-représentée dans la recherche allemande. De nombreux pans de ce qu’il s’est passé il y a plus de 100 ans dans les colonies allemandes sont ainsi rarement étudiés. Il y a pourtant matière à recherche car, jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale en 1918, les troupes de l’Empire allemand occupèrent notamment la Namibie actuelle, le Cameroun, le Togo, la Tanzanie, une partie du Ghana, la ville de Qingdao en Chine ainsi que plusieurs îles dans l’ouest du Pacifique et en Micronésie, avec parfois des conséquences terribles comme le génocide des Hereros et des Namas en Namibie en 1904 et 1905. Le programme de bourses « German Colonial Rule » (GCR), initié par l’Office allemand d’échanges universitaires (DAAD) et financé à hauteur d’1,2 million d’euros par le ministère fédéral des Affaires étrangères, veut combler cette lacune. Ainsi, neuf jeunes chercheuses et chercheurs dans des universités allemandes pourront, d’ici 2026, présenter leur thèse de doctorat sur le passé colonial allemand et ses conséquences.
Réécrire l’histoire coloniale

L’une de ces boursières est la Namibienne Gloria Unotjari Tjitombo qui prépare son doctorat à l’université de Cologne. « Je vois dans ce programme une opportunité de réécrire l’histoire de la Namibie d’un point de vue namibien », explique-t-elle. C’est l’occasion de recueillir les voix des populations véritablement concernées. En tant que Namibienne, il lui semble plus facile de comprendre les populations et leur histoire. Cette doctorante, qui a obtenu son master à l’University of Namibia, se penche dans sa thèse sur le modèle de travail dans son pays – sous la forme d’une étude de longue durée du régime colonial allemand jusqu’à la Namibie post-coloniale. « Le travail était l’un des facteurs déterminants de l’histoire coloniale allemande en Namibie », précise Gloria Unotjari Tjitombo qui veut maintenant étudier les secrets et la complexité de cette question multiforme en Namibie et, ainsi, apporter - en tant que sociologue – « un nouveau regard sur le monde du travail qui a fait défaut au cours des 20 dernières années ».
Un large éventail de thèmes de recherche

La diversité des thèmes de recherche auxquels se consacrent les boursiers et boursières est vaste. Ils vont de la biographie de personnes ayant dirigé des administrations coloniales ou occupé d’autres postes à responsabilité dans l’Empire allemand, y compris des fonctions de secrétaires d’État, à l’étude du rôle des administrations allemandes dans le droit, le commerce, les affaires militaires, en passant par la comparaison des politiques coloniales de différents pays. Christian Lemuel Magaling a obtenu son master à l’University of the Philippines et prépare aujourd’hui son doctorat à l’Université de Bonn. « Mon objectif est d’analyser l’implication coloniale de l’Allemagne en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique pendant la domination impériale allemande », détaille cet étudiant. Concrètement, cela signifie qu’il veut retracer la construction de la volonté de l’empereur de s’immiscer dans la politique coloniale de ces régions. Il analyse des lettres, des directives et des études scientifiques ainsi que la résistance des intellectuels locaux.
Assumer une responsabilité historique et morale
Le président du DAAD, le professeur Joybrato Mukherjee, voit dans les projets des chercheurs et chercheuses venant d’anciennes colonies menés en coopération avec leurs collègues dans les universités allemandes un signal fort de rapprochement dans le monde. « Le DAAD contribue ainsi à assumer une responsabilité historique et morale pour la souffrance infligée aux populations dans nombre de pays africains et asiatiques », développe-t-il.
Katja Keul, ministre adjointe chargée de la politique culturelle internationale au ministère fédéral des Affaires étrangères, avance des motivations similaires. « Le gouvernement fédéral est bien décidé à faire avancer l’analyse du passé colonial de l’Allemagne », affirme-t-elle. La recherche joue ici un rôle de premier plan. « Nous connaissons trop peu le rôle des administrations allemandes pendant l’époque coloniale. Nous tenons à étudier ce chapitre de notre histoire avec des chercheuses et des chercheurs des pays ayant connu la colonisation », souligne-t-elle.
Des échanges internationaux
En attendant, le doctorant philippin Christian Lemuel Magaling est heureux que sa bourse lui ouvre de nouveaux espaces de recherche. Il a ainsi accès aux archives et aux bibliothèques allemandes. Son séjour à l’Université de Bonn l’aide aussi à nouer de nouveaux contacts et à élargir son réseau. « Il est inhabituel que des scientifiques puissent comparer la recherche sur la colonisation dans différentes régions du monde car chaque régime colonial avait sa méthode pour gérer, contrôler et opprimer la résistance à la colonisation », précise-t-il. Normalement, pouvoir discuter avec des collègues africains est rarement possible. Grâce à la bourse que lui accorde le DAAD, de tels échanges lui seront possibles dans les années à venir.
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