Bienvenue sur les pages du Ministère fédéral des Affaires étrangères

À Francfort, le berceau de la démocratie allemande va devenir un lieu de mémoire

L’Église Saint-Paul de Francfort/M.

L’Église Saint-Paul de Francfort/M., © picture alliance / greatif | Florian Gaul

25.04.2023 - Article

L’Église Saint-Paul de Francfort-sur-le-Main. a vu siéger en 1848/1849 le premier Parlement allemand démocratiquement élu. Ce symbole historique va être transformé en un lieu de mémoire et d’éducation. Une commission d’experts vient de présenter des propositions.

À l’heure où l’on célèbre le 175e anniversaire de la Révolution de 1848/1849 en Europe, l’Église Saint-Paul de Francfort-sur-le-Main, l’un de ses symboles, va être transformée en lieu de mémoire et d’éducation. La commission d’experts mandatée pour définir les contours du projet vient de remettre ses recommandations. Elle préconise la rénovation de ce berceau de la démocratie allemande et son intégration dans un ensemble architectural comprenant une Maison de la démocratie.

L’Église Saint-Paul a été l’un des principaux théâtres du vent de liberté démocratique qui a soufflé sur l’Europe en 1848/1849. Du 18 mai 1848 au 31 mai 1849, elle a vu siéger l’Assemblée nationale allemande (ou Parlement de Francfort), la première assemblée issue d’élections libres représentant toute l’Allemagne. Cette assemblée a rédigé la première Constitution démocratique allemande, qui fut adoptée le 27 mars 1849.

« Ancrer une conception commune de notre identité en tant que démocratie libérale »

Selon les recommandations de la Commission d’experts, le bâtiment va subir des travaux de rénovation et de modernisation. À ses côtés sortira de terre sur la Paulsplatz une Maison de la démocratie, conçue comme un lieu de communication, d’éducation civique et historique et de débats.

« L’unité [des deux bâtiments] sera une chance majeure de faire davantage prendre conscience de l’importance de l’Église Saint-Paul », souligne Volker Kauder, président de la commission. « Elle ouvrira ce site historique aux questions des générations futures. […] La Maison de la démocratie pourra accueillir des débats politiques et des activités de participation démocratique. L’Église Saint-Paul deviendra ainsi un site de mémoire pour notre démocratie, et simultanément un lieu pédagogique ».

« Les recommandations de la commission tracent des perspectives pour l’avenir de l’un des lieux les plus éminents de l’histoire démocratique allemande », a commenté la ministre déléguée à la Culture, Claudia Roth. L’effort sera porté conjointement par la ville de Francfort, du land de Hesse et de l’État fédéral. « Nous allons en faire le point d’ancrage d’une conception commune de notre identité en tant que démocratie libérale. Le site montrera de manière beaucoup plus tangible qu’aujourd’hui pourquoi nous devons, tous autant que nous sommes, cultiver et défendre chaque jour nos acquis démocratiques. »

L’Église Saint-Paul, ancienne église luthérienne érigée entre 1789 et 1833, sera rénovée à partir de l’état architectural de 1948, sans reconstruction d’éléments antérieurs. La grande salle sera réaménagée pour pouvoir accueillir des manifestations et des activités d’éducation civique. La Maison de la démocratie formera avec elle un ensemble architectural. Elle permettra d’imaginer des formats d’activités, de transmission, de débat et de participation citoyenne complémentaires.

Le « berceau de la démocratie allemande »

175 ans après la Révolution de 1848, le projet souligne que la période de 1848/1849 reste un point de départ essentiel de l’histoire de la démocratie en Allemagne.

Au 19e siècle, le mouvement pour l’unité nationale et la démocratie a dû attendre de nombreuses années avant de voir se concrétiser sa revendication d’une Assemblée nationale. Il a fallu la pression de la Révolution de mars 1848 pour que les gouvernements des États allemands n’aient plus le choix et convoquent des élections pour élire une « Assemblée nationale allemande constituante ».

Jamais encore dans l’histoire allemande une assemblée issue du suffrage universel (masculin) et libre n’avait vu le jour. L’Église Saint-Paul de Francfort a été choisie pour l’accueillir car elle était le seul lieu de la ville capable d’abriter un aussi grand nombre de députés. Sa nef ronde surmontée d’une coupole culminant à 30 mètres de hauteur, avec des sièges disposés en hémicycle et ses 20 colonnes ioniennes, pouvait accueillir jusqu’à 2000 personnes.

L’Assemblée nationale était présidée par le député libéral Heinrich von Galgen. Elle a fourni un travail dense, émaillé de débats vifs. On lui doit principalement la rédaction de la première Constitution démocratique. Un texte éminemment moderne qui a consacré pour la première fois les droits fondamentaux. Il les énumérait sous la forme d’un catalogue : liberté d’expression, liberté de la presse, liberté de conscience, liberté de réunion, égalité devant la loi, libre circulation, libre exercice d’une profession, inviolabilité de la propriété privée, abolition de la peine de mort.

C’était le texte le plus libéral, démocratique et social jamais écrit en Allemagne, et l’une des Constitutions les plus progressistes de son époque. Il prévoyait un État allemand unitaire et fédéral intégrant tous les États de la Confédération germanique, à l’exception de l’Empire autrichien. À sa tête devait régner un empereur héréditaire, également habilité à mettre le gouvernement en place. Mais le roi de Prusse, Frédéric Guillaume IV, refusa la couronne impériale, les forces réactionnaires regagnèrent du terrain et le Parlement finit par se saborder.

La Constitution de 1849 a toutefois laissé des traces profondes. Jamais appliquée, elle a fortement inspiré les rédacteurs de la Constitution de la République de Weimar en 1919 et ceux de la Loi fondamentale de la République fédérale en 1948/49.

A.L.

Retour en haut de page