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Exposition à Trèves : qu’est-ce qui a causé la chute de Rome ?
![[G.] Affiche de l’exposition ; [Dr.] Tête d’Aphrodite (Ier siècle apr. J.C.), prêt prestigieux du musée d’Athènes © Musée régional de Rhénanie-Palatinat ; © picture alliance/dpa | Harald Tittel [G.] Affiche de l’exposition ; [Dr.] Tête d’Aphrodite (Ier siècle apr. J.C.), prêt prestigieux du musée d’Athènes](/blob/292/1d405f76d7ae8e678c7864e62790f650/loading-data.gif)
[G.] Affiche de l’exposition ; [Dr.] Tête d’Aphrodite (Ier siècle apr. J.C.), prêt prestigieux du musée d’Athènes, © Musée régional de Rhénanie-Palatinat ; © picture alliance/dpa | Harald Tittel
Invasions barbares, difficultés économiques, climat : de nombreuses théories expliquent la chute de Rome. Mais l’effondrement d’une civilisation aussi brillante conserve une part de mystère. À Trèves, une exposition-événement tente de résoudre l’énigme.
Rome couvrait à son zénith la plus grande partie de l’Europe, de l’Afrique du Nord et du Proche-Orient. Un immense territoire gouverné avec intelligence, administré avec rigueur et doté d’infrastructures résilientes. Pendant des siècles, il a incarné le sommet de la puissance et de la civilisation. Puis il décliné, avant de disparaître dans le courant du Ve siècle après J.C. Pourquoi un tel effondrement ? Comment s’est-il déroulé ? Le sujet passionne de longue date. Des centaines de théories ont fleuri. Mais que sait-on ? Dans l’ancienne cité antique de Trèves (Rhénanie-Palatinat), une triple exposition tente d’apporter des réponses.
Elle s’intitule « La chute de l’Empire romain », et s’annonce comme l’un des grands événements culturels de l’année 2022 en Allemagne. Elle comporte trois volets bien distincts. Ils sont à découvrir jusqu’au 27 novembre.
Trèves, ville témoin de la chute de Rome
Le volet principal est constitué par la partie historique. Il est hébergé au Musée régional rhénan, établissement qui a déjà présenté ces dernières années des expositions-événements sur les empereurs Constantin et Néron. Cette fois, il retrace la période allant du IIIe au Ve siècle après J.C. Une époque peu connue et rarement abordée, qui a vu le déclin, puis la chute de l’Empire romain.
Trèves était un lieu idoine pour explorer une telle thématique. La plus ancienne ville d’Allemagne a été fondée par Auguste en 17 avant J.C. À la fin du IIIe siècle, elle est devenue un centre administratif majeur de l’Empire en accédant au statut de préfecture de Gaule. Au IVe siècle, sous le règne de Constantin et sous les Valentiniens, elle a été le siège de la cour impériale.
Surnommée la « Rome du Nord », elle a été un pôle de pouvoir et un phare culturel au cours des deux derniers siècles de la civilisation romaine. Puis, elle a subi les coups de boutoir des invasions barbares. Aujourd’hui, ses vestiges (Porta Nigra, thermes, amphithéâtre etc.) bien conservés en font un site d’une rare authenticité.
L’exposition met cette richesse en valeur. Elle bénéficie également de prêts venant d’établissements prestigieux (Musée archéologique d’Athènes, Louvre, British Museum etc.). Elle rassemble au total près de 700 objets venant de 130 musées de 20 pays. On y trouve des joyaux qui voyagent rarement : un buste en marbre de la déesse Aphrodite venant du Musée d’Athènes (photo), un buste d’une statue impériale en porphyre découverte à Ravenne, des mosaïques d’Afrique du Nord, une petite tête de lion en cristal, des bijoux, des casques, des céramiques, etc.
Telle un soleil au zénith qui s’apprête à décliner
Le parcours de l’exposition s’appuie sur une mise en scène soignée. Le visiteur se voit proposer un voyage dans le passé avec ses sons, ses couleurs, son quotidien. La course du soleil est utilisée métaphoriquement comme un repère pour matérialiser le temps qui passe sur la pente du déclin. La première pièce est baignée de la lumière du midi. Puis les tons orange succèdent à la clarté du zénith avant de se dégrader vers le rouge jusqu’à l’incendie final.
L’Empire finissant victime d’une conflictualité croissante

Quels ont été les facteurs du déclin de Rome ? On a évoqué les invasions barbares, les difficultés économiques, la difficile levée de l’impôt, le climat : plus de 700 théories tentent d’approcher ce qui reste pour partie un mystère.
Pour le musée régional rhénan, le déclin s’est étiré sur une longue période allant de 340 à la déposition du dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustule par le barbare Odoacre en 476. En 350, l’Empire est encore au zénith. Les quatre empereurs de la tétrarchie cherchent à installer leurs cours dans de nouvelles résidences. Ils tiennent à la loyauté de leurs fonctionnaires et généraux, qu’ils s’attachent souvent par des cadeaux.
Puis, la conflictualité augmente. Elle émerge aux frontières de l’Empire, mais aussi en son sein. Putsch de généraux contre l’empereur, transformation de l’armée romaine sous l’effet de l’intégration de guerriers germains, guerres civiles : « L’Empire se déchire lui-même de plus en plus », explique Marcus Reuter, directeur du musée. « Cela affaiblit l’armée romaine », tandis que les attaques extérieures se multiplient avec leur lot de pillages.
« À partir de 400 après J.C., la pente du déclin est vraiment engagée », commente M. Reuter. Le sac de Rome par les Wisigoths d’Alaric, en août 410, marque une étape. L’Empire romain s’effrite, puis s’effondre. Pour les concepteurs de l’exposition, la pression conjuguée des conflits externes et internes en constitue l’explication principale.
La survivance symbolique de Rome
Le cadre historique posé, l’exposition ouvre deux autres volets passionnants. Ils montrent que, si la chute matérielle de l’Empire romain a ouvert des siècles jugés « sombres », il n’en a pas été de même sur le plan symbolique.
Rome s’est perpétuée de deux manières. La première est présentée au Musée municipal Simeonstift, qui s’intéresse à la réception de la chute de Rome dans l’art. Du Moyen-Âge à nos jours, celle-ci a oscillé entre deux pôles. D’une part, les dirigeants de l’Église de l’Antiquité tardive ont mythifié la chute de Rome. De l’autre, au XIXe siècle, les mouvements nationalistes émergents l’ont réinterprétée comme un symbole de liberté. Ils se sont appuyés sur des figures héroïques incarnant la libération contre Rome, symbole de l’envahisseur : Vercingétorix en France, Arminius (Hermann le Chérusque) en Allemagne, Boadicée en Grande-Bretagne, Ambiorix en Belgique.
La seconde perpétuation de l’Empire romain a concerné sa composante chrétienne. Celle-ci a non seulement survécu, mais elle s’est épanouie. Trèves, qui fut un évêché de première importance après la chute de Rome, illustre cette renaissance après l’effondrement.
Le Musée de la cathédrale en fait le récit des débuts du christianisme au VIIe siècle. Il montre les continuités et les ruptures dans la transmission de la civilisation romaine et le rôle que les Chrétiens ont joué. Les évêques ont rempli le vide laissé par les structures de l’Empire en endossant de nouvelles fonctions profanes, qui ont accru leur influence. La fin de l’Empire a laissé la place à l’essor de la foi.
A.L.
« Der Untergang des Römischen Reiches » au Musée Régional Rhénan
(litt. : La chute de l’Empire romain)
« Das Erbe Roms. Visionen und Mythen in der Kunst »
(litt.: L’héritage de Rome. Vision et mythes dans l’art) au Musée municipal Simeonstift
»Im Zeichen des Kreuzes – Eine Welt ordnet sich neu« au Musée de la Cathédrale
(litt.: Sous le signe de la Croix – Un monde se réorganise« )
Expositions à visiter à Trèves du 25 juin au 27 novembre 2022