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Exposition : la mémoire de la Shoah après la mort des témoins

Comment se perpétuera la mémoire quand les voix des survivants se seront tues et leurs regards éteints ?, © picture alliance / photothek | Janine Schmitz
Il reste quelques centaines de milliers de témoins directs de l’Holocauste. Mais demain ? Comment se perpétuera la mémoire quand leurs voix se seront tues et leurs regards éteints ? C’est le thème d’une exposition à la Nouvelle Synagogue de Berlin.
Ils sont encore quelques centaines de milliers à travers le monde à pouvoir témoigner. Près de 80 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les survivants de l’Holocauste constituent la mémoire vivante des atrocités nazies. À travers leurs voix, leurs regards, leurs gestes et parfois leurs larmes, les jeunes générations se confrontent à l’impensable, pour ne jamais oublier. Mais qu’adviendra-t-il de cette chaîne mémorielle une fois les derniers témoins disparus ? Comment leur récit sera-t-il transmis et reçu quand leurs voix se seront tues et leurs regards éteints ? C’est le thème d’une exposition qui vient d’ouvrir ses portes à la Nouvelle Synagogue – Centrum Judaicum de Berlin.
Elle s’intitule « La fin du témoignage » et raconte jusqu’au 8 janvier 2023 l’histoire de la mémoire de la Shoah de 1945 à nos jours. Elle s’appuie sur des vidéos, des photos et de nombreux autres documents. Elle illustre la relation complexe qui se tisse entre le récit des survivants et la société au sein de laquelle ils vivent, d’hier à demain.
Une histoire de la mémoire depuis 1945

Au lendemain de la guerre, les survivants sont souvent restés seuls avec leurs souvenirs. Il a fallu attendre les années 1980 pour que leur récit rencontre l’intérêt du public, en Allemagne et dans le monde. À partir des années 1990, beaucoup d’entre eux se sont rendus dans les écoles pour raconter leur histoire aux jeunes et assurer la transmission de la mémoire. D’innombrables journalistes, documentaristes et cinéastes s’y sont aussi intéressés. Ils ont saisi leurs témoignages sur la pellicule pour qu’ils ne disparaissent pas avec eux.
Grâce aux témoins qui ont raconté leur douloureuse histoire, « nous pouvons tirer des leçons pour aujourd’hui et pour demain », a souligné la ministre fédérale adjointe à la Culture, Claudia Roth. « Pour défendre notre démocratie et les bases de notre vivre-ensemble au quotidien, et surtout pour protéger la dignité humaine et lutter contre l’antisémitisme, le racisme et toute forme de misanthropie. »
« Le silence fait partie du récit »
La ministre entend conserver ces témoignages et les intégrer de manière pérenne dans la culture du souvenir. Mais « il faut pour cela élaborer des formats nouveaux, contemporains permettant d’assurer la transmission et de toucher l’ensemble la société dans sa pluralité », a-t-elle souligné.
C’est dans cette direction que l’exposition présentée à la Nouvelle Synagogue ouvre des pistes. Elle montre, par exemple, les coulisses des entretiens avec les survivants. Elle n’hésite pas à les diffuser dans leur intégralité, sans effacer les silences ou les moments d’émotion. « Le silence aussi, fait partie du récit », souligne la commissaire, Anika Reichwald.
L’exposition développe également une réflexion sur la manière d’aborder ces témoignages de manière responsable dans les musées, les mémoriaux et les institutions.
Enfin, conçue en 2019 par le Musée juif d’Hohenem et le mémorial du camp de Flossenbürg, elle est présentée à Berlin dans une version enrichie. On y découvre des témoignages de juifs berlinois. De différentes origines et générations, ils offrent leur point de vue sur la transmission.
Selon Mme Reichswald, il n’est pas possible de savoir ce que va changer la disparition des derniers témoins. Mais l’impressionnante quantité de témoignages immortalisés sur la pellicule permettra que la transmission se poursuive. L’entretien de la mémoire par les générations futures sera différent, confirme Anja Siegemund, directrice du Centrum Judaicum. « Les choses changeront. Elles changent en permanence »
A.L.
Ende der Zeitzeugenschaft
(La fin du témoignage)
Exposition à la Nouvelle Synagogue – Centrum Judaicum de Berlin, du 7 juillet 2022 au 8 janvier 2023