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Berlinale : le cinéma dans toute sa puissance

Vicky Krieps. „Ingeborg Bachmann – Journey into the Desert“ de Margarethe von Trotta, présenté lors de la 73e Berlinale

Vicky Krieps. « Ingeborg BachmannJourney into the Desert » de Margarethe von Trotta, présenté lors de la 73e Berlinale, © Wolfgang Ennenbach

20.02.2023 - Article

La 73e Berlinale se tient du 16 au 26 février. Un festival fidèle à sa réputation, qui se veut au service du public et plus politique que jamais. À l’affiche, un large éventail de thèmes qui va de l’Ukraine à l’Iran, en passant par la littérature, l’histoire ou les évolutions sociales.

« Celui qui tourne des films et qui les présente en des temps troublés résiste au manque de liberté. C’est ce cinéma, celui qui nous relie les uns aux autres par-delà les frontières, plus directement et sans intermédiaire que toute autre forme d’art que nous voulons célébrer ». C’est par ces mots que Claudia Roth, ministre allemande adjointe à la Culture, a inauguré la 73e Berlinale le 16 février. Le Festival international du cinéma de Berlin, l’un des plus importants avec ceux de Cannes et de Venise, est pleinement de retour après deux années de pandémie. Plus fidèle que jamais à sa réputation.

Après l’arrivée d’une nouvelle direction (constituée de Mariette Rissenbeek et de Carlo Chatrian), suivie de la pandémie, le public aurait pu s’attendre à des bouleversements. Mais la Berlinale est restée la Berlinale. Aujourd’hui comme hier, son profil est celui d’un grand festival de cinéphiles, axé sur le public, avec une coloration nettement politique.

De l’Ukraine à l’Iran

Inauguration de la Berlinale, le 16 février. Duplex avec Volodymyr Zelensky. L’acteur et réalisateur américain Sean Penn présente à Berlin un documentaire consacré au président ukrainien
Inauguration de la Berlinale, le 16 février. Duplex avec Volodymyr Zelensky. L’acteur et réalisateur américain Sean Penn présente à Berlin un documentaire consacré au président ukrainien© picture alliance

Un an après l’invasion russe, l’Ukraine a paru plus proche que jamais. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’est exprimé en direct durant la cérémonie d’inauguration. Le lendemain, Sean Penn a présenté son film « Superpower », qui dresse un portrait pris sur le vif et émouvant du dirigeant ukrainien.

Le hasard a voulu que l’acteur et réalisateur américain se trouve à Kiev le 24 février 2022, jour du basculement dans une nouvelle ère. Il avait rendez-vous le jour-même avec Volodymyr Zelensky pour une interview. Non seulement l’interview a eu lieu, mais Sean Penn est resté sur place pour filmer le président dans la guerre. Il s’est profondément attaché à l’Ukraine et à ses habitants, qu’il décrit avec une émotion encore brûlante.

La Berlinale a aussi braqué ses projecteurs sur le combat pour la liberté des Iraniens. Le festival veut « donner une voix aux gens en Iran », a souligné Mariette Rissenbeek. Une manifestation de soutien s’est déroulée en présence d’une cinquantaine de cinéastes, scénaristes et acteurs iraniens. La programmation s’est, par ailleurs, largement ouverte aux cinéastes iraniens dissidents. Avec, en particulier, la projection de deux documentaires sur la dissidence iranienne (« Sept hivers à Téhéran » de Steffi Niderzoll et « Mon pire ennemi » de Mehran Tamadon« ).

Margarethe von Trotta ressuscite Ingeborg Bachmann

La 73e Berlinale est aussi marquée par une présence en force des réalisateurs allemands. Cinq des 19 films engagés dans la compétition officielle pour les Ours d’or et d’argent sont l’œuvre de réalisatrices ou de réalisateurs allemands.

La cinéaste Margarethe von Trotta a ainsi offert au public un grand moment avec la projection de  » Ingeborg Bachmann – Voyage dans le désert« . Elle y fait le récit de la relation entre la poétesse autrichienne Ingeborg Bachmann (1926-1973) et l’écrivain suisse Max Frisch (1911-1991). Une relation vouée à l’échec, tant la lourdeur jalouse du second avait de quoi étouffer l’espoir partagé d’un amour libre et ouvert. Le film en conte les espoirs et les rebondissements. Il mène le spectateur dans les villes refuges de Zurich et Rome, et surtout dans le désert égyptien où le couple a entrepris un grand voyage avec l’écrivain Adolf Opel et le compositeur Hans Werner Henze.

Connue pour ses portraits féminins ( »Rosa Luxemburg« ,  »Hildegard von Bingen « ,  »Hannah Arendt « ), Margarethe von Trotta réalise ici l’exploit de faire vivre non seulement ses personnages, mais aussi de montrer l’émergence du processus d’écriture, la genèse de la création artistique. Elle montre la vie dans toute sa richesse, avec ses passions et ses souffrances, et l’art qui en est le reflet. Sans aucun pathos. Mais avec une grande qualité de présence que maintiennent d’un bout à l’autre tous les acteurs, dont Vicky Krieps en Ingeborg Bachmann et Ronald Zehrfeld en Max Frisch.

Espoirs et incertitudes dans les dernières heures de la RDA

Également en lice pour les Ours de la Berlinale, la réalisatrice allemande, Emily Atef transporte, de son côté, les spectateurs dans l’Allemagne de l’été 1990. Son film, intitulé  » Irgendwann werden wir uns alles erzählen «  (Someday We'll Tell Each Other Everything), est l’adaptation d’un roman de Daniela Kriens. Il a pour sujet une histoire d’amour entre une jeune femme, Maria, et un paysan quadragénaire plutôt marginal dans une campagne isolée des dernières semaines de la RDA. Le film aux couleurs nostalgiques illustre de l’intérieur les incertitudes vécues à l’approche de la réunification.

Les difficultés et les limites de la communication, des relations interpersonnelles à la guerre, sont d’ailleurs en arrière-plans de nombreux films présentés lors de cette Berlinale. Le film australien  »The Survival of Kindness«  de Rolf de Heer est un drame presque muet, qui voit une femme noire fuir à travers un paysage colonial post-apocalyptique, ravagé par une épidémie et des êtres supérieurs portant des masques à gaz. Dans un genre plus léger et satirique, le docu-fiction canadien  »Blackberry «  de Matt Johnson raconte les origines du smartphone.

Le palmarès sera dévoilé à la fin de la semaine. En attendant, le réalisateur américain Steven Spielberg a d’ores et déjà reçu l’Ours d’or d’honneur de la Berlinale pour l’ensemble de son œuvre. Il présente à la Berlinale son dernier film,  » The Fabelmans « . Un film autobiographique qui est sans doute le plus personnel de toute sa carrière.
A.L.

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