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Discours de la ministre fédérale des Affaires étrangères Annalena Baerbock à l’occasion du débat sur la Stratégie pour la Chine au Bundestag

Annalena Baerbock, ministre des Affaires étrangères, s'adresse aux députés en séance plénière du Bundestag. Il s'agit de la stratégie du gouvernement fédéral à l'égard de la Chine.

Annalena Baerbock, ministre fédérale des Affaires étrangères, s'adresse aux députés en séance plénière du Bundestag. Il s'agit de la stratégie du gouvernement fédéral à l'égard de la Chine., © picture alliance/dpa | Kay Nietfeld

29.09.2023 - Article

« La Chine constitue notre plus grand défi en matière de sécurité. »

« Nous ne voulons pas [en Afrique] remplacer les chaînes qui nous entravaient hier par de nouvelles. »

« Nous avons besoin de la Chine pour endiguer la crise climatique. »

Il s’agit là de trois citations différentes, prononcées respectivement par une collègue d’Asie, par le président du Nigéria dans son discours devant l’Assemblée générale de l’ONU à New York ainsi que par une représentante des Nations Unies, lorsque nous nous sommes toutes et tous retrouvés la semaine dernière à New York.

Cela démontre que nous ne sommes pas les seuls à être grandement préoccupés par notre relation avec la Chine. C’est également le cas de la plupart de nos partenaires à travers le monde. Car la Chine se transforme : en tant que partenaire, concurrent et, de plus en plus aussi, en tant que rival systémique.

Comme nous le savons toutes et tous, la Chine n’est pas n’importe quel pays : elle compte 1,4 milliard d’habitants et d’habitantes, il s’agit de notre principal partenaire commercial et c’est à présent l’une des plus grandes puissances militaires du monde. Rien d’étonnant donc à ce que les dernières nouvelles émanant de la région nous préoccupent de nouveau toutes et tous autour du globe. Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense ont été révoqués ou ils ne sont tout simplement plus là. Le pays est en proie à une sérieuse crise de l’immobilier et le chômage des jeunes semble connaître une hausse alarmante. Pékin ne publie toutefois plus de chiffres.

Sans oublier par ailleurs le grand sujet que représente la politique extérieure. D’un côté, et c’est pour toutes et tous sur cette planète un grand soulagement, les États-Unis et la Chine se rapprochent enfin. De l’autre côté, le gouvernement chinois apporte son soutien à Bachar el‑Assad, entretient des relations diplomatiques avec les talibans et agit de manière de plus en plus offensive dans la région indopacifique.

Cela se traduit notamment sur la nouvelle carte que le gouvernement chinois vient de publier. Elle n’a quasiment pas retenu l’attention chez nous, mais elle est source de vives préoccupations pour celles et ceux qui vivent sur le pourtour de la mer de Chine méridionale. Car lorsque l’on y jette un œil, on remarque qu’il s’agit de revendications concernant la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, s’étendant presque jusqu’aux côtes des autres États riverains, et qui attisent les conflits territoriaux avec d’autres États voisins ; détail intéressant : même avec la Russie.

Nous ne saurions ignorer ou passer outre cette évolution. Notre futur positionnement, avec nos partenaires – l’UE en premier lieu, mais aussi nos partenaires internationaux –, s’inscrit dans le cadre d’un processus que nous avons d’ores et déjà enclenché de manière intensive, au sein du gouvernement fédéral comme ici au parlement.

Je tiens donc à cette occasion à remercier chaleureusement mes collègues du Bundestag allemand, en particulier les membres de la commission des affaires étrangères, mais aussi toutes les autres commissions pour leur contribution à notre Stratégie pour la Chine.

Malgré le peu de temps qui m’est imparti, j’aimerais souligner ici trois points.

Premièrement, l’atténuation des risques, c’est-à-dire le « dérisquage » et non le « découplage » : nous y œuvrons ensemble depuis plusieurs mois déjà, et ce en discutant et collaborant avec l’ensemble des ministères. À cet effet, il est essentiel que nous développions nos relations économiques, c’est-à-dire que nous poursuivions notre diversification. C’est de cela dont il est justement question dans la stratégie européenne en matière de sécurité économique et nous en avons également parlé lors des nombreux entretiens menés récemment à New York, comme je le disais plus tôt, au sein de différentes organisations internationales.

J’ai ainsi discuté avec mon homologue australienne Penny Wong du fait que l’Australie extrait plus de la moitié du lithium à l’échelle mondiale, alors que 90 pour cent de ce lithium sont ensuite envoyés directement en Chine pour leur transformation. Cela représente également un véritable problème pour l’Australie. Nous, l’UE, importons par ailleurs 90 pour cent de nos besoins en lithium de Chine, au lieu d’entretenir directement de telles relations avec l’Australie. Pour minimiser les risques, il conviendra donc à l’avenir d’éviter ce détour en promouvant la transformation des matières premières critiques dans les pays producteurs, comme l’Australie.

Cela ne va évidemment pas de soi. Une question revient souvent : qu’est-ce que la politique a à voir là-dedans ? En fait, s’il était question de logique et non de politique, ce détour n’existerait pas depuis des dizaines d’années. C’est pourquoi une stratégie active en matière de sécurité économique s’avère nécessaire et c’est pourquoi nous nous engageons de manière intensive, en particulier le ministre de l’Économie Robert Habeck et le ministère fédéral des Affaires étrangères mais aussi d’autres collègues, pour faire évoluer ensemble notre politique en matière de sécurité économique.

Deuxièmement, nous devons commencer ici chez nous et réduire nos dépendances unilatérales, notamment en contrôlant encore plus soigneusement les investissements étrangers en Allemagne. Le gouvernement fédéral vient ainsi d’interdire le rachat complet d’une entreprise de satellites allemande par des investisseurs chinois. Le futur règlement anti-coercition de l’UE qui entrera bientôt en vigueur a également un rôle à jouer ici.

Il fait bon le répéter de temps à autre : nous ne devrions pas mettre nos acquis sous le boisseau. Nous disposons au sein de l’UE d’un outil commun extrêmement puissant : notre marché intérieur commun.

Les entreprises chinoises ont elles aussi besoin de ce marché commun européen, tout comme nous ne pouvons nous passer du marché chinois.

Nous ne saurions donc être indifférents aux tensions entourant Taiwan, et ce notamment pour des motifs économiques. Une escalade militaire serait inacceptable et nuirait aussi gravement à nos propres intérêts économiques.

Troisièmement, et c’est une chose que nous soulignons également dans notre Stratégie pour la Chine, le monde est plus sûr et meilleur si nous collaborons ensemble en nous fondant sur des règles justes. C’est une offre que nous faisons constamment à tous les pays, y compris à la Chine. Dans cette Stratégie pour la Chine, nous insistons donc sur le fait que nous voulons coopérer partout où c’est possible, mais sur la base de règles communes et justes.

C’est pourquoi il s’avère pour nous si important de travailler main dans la main sur des problématiques mondiales, telles que la protection de la santé, le commerce équitable, et surtout, la crise climatique. C’est justement pour cela que notre représentante spéciale pour la politique climatique internationale, Jennifer Morgan, vient de se rendre en Chine, afin de discuter des progrès communs que nous pourrons réaliser conjointement avec la Chine lors de la prochaine conférence sur le climat, la COP28.

Chères et chers collègues, notre Stratégie pour la Chine est un appel à l’action : avec le gouvernement fédéral, avec le Bundestag allemand, avec les acteurs économiques et scientifiques, avec la société ainsi qu’avec nos partenaires européens et internationaux.

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