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Semaine de quatre jours : que révèle la première étude pilote réalisée en Allemagne ?
Les résultats d’une vaste expérimentation de la semaine de quatre jours viennent d’être publiés en Allemagne, © picture alliance/dpa | Sina Schuldt
45 entreprises allemandes ont testé la semaine de quatre jours pendant six mois dans le cadre d’une étude pilote. Productivité, satisfaction au travail, santé : les résultats viennent d’être présentés. Quels bénéfices ? Quelles limites ? Un tour d’horizon.
Il s’agit de la plus vaste expérimentation menée en Allemagne sur la semaine de quatre jours. Depuis février, 45 entreprises et quelque 900 salariés de différents secteurs d’activité ont testé la semaine de quatre jours sous l’œil attentif de chercheurs de l’Université de Münster, en coopération avec la société de conseil Intraprenör. Six mois plus tard, les résultats viennent d’être présentés. Ils sont plutôt positifs tant pour les salariés que pour les entreprises.
« L’introduction de la semaine de quatre jours a pour effet d’améliorer significativement la satisfaction (des salariés), principalement en raison de l’augmentation du temps libre », rapporte la directrice de l’étude Julia Brackmann, titulaire de la chaire Transformation du monde du travail à l’Université de Münster (Rhénanie-du-Nord-Westphalie). Ainsi, 64 % des salariés désiraient passer plus de temps avec leur famille avant la mise en place de la semaine de quatre jours. Ils n’étaient plus que 50 % pendant l’expérimentation.
Les motivations des entreprises participantes étaient d’accroître leur activité pour attirer une main-d’œuvre plus rare, d’améliorer la santé de leurs salariés ou bien encore de tester une stratégie d’avenir possible. Les salariés ont vu leur niveau de stress évalué à l’aide de montres connectées, qui ont enregistré leurs données physiologiques. Des prélèvements de cheveux ont aussi été réalisés pour quantifier le taux de cortisol, l’« hormone du stress ».
Moins de stress, plus d’activité et de sommeil
Le résultat a été visible : moins de stress, moins de burnouts et un niveau d’activité accru, mesuré grâce au nombre de pas quotidien et à la quantité de mouvements. Les salariés passés à la semaine de quatre jours ont aussi dormi davantage, précisément 38 minutes de plus par semaine que le groupe témoin. Enfin, ils ont été un peu moins souvent en arrêt maladie. Mais sans qu’on constate une différence statistiquement significative par rapport à 2023.
Du côté des entreprises, les conclusions sont tout aussi positives, à tel point que 70 % d’entre elles souhaitent soit poursuivre l’expérimentation, soit passer définitivement à la semaine de quatre jours. « Les indicateurs de performance, tels que le chiffre d’affaires et les bénéfices, ont légèrement augmenté, sans toutefois creuser un écart significatif avec ceux de l’année précédente », relate Julia Brackmann. « Mais leur constance en dépit de la réduction du temps de travail laisse penser que des gains de productivité ont été réalisés. » D’ailleurs, tant les entrepreneurs que leurs salariés ont « perçu que la productivité avait tendance à augmenter. »
Des potentiels cachés
La réduction du temps de travail n’a pas été compensée par le recours à davantage d’heures supplémentaires mais par des adaptations, soulignent les chercheurs. Plus de 60 % des salariés ont mentionné une baisse des distractions et l’optimisation des procédures. Plus de la moitié décrivent un changement de culture dans l’organisation des réunions, dont la fréquence ou la durée ont été réduites. Un quart évoque le recours à des innovations numériques pour accroître l’efficacité.
Pour Carsten Maier, du cabinet de conseil Intraprenör, il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton pour réussir le passage à la semaine de quatre jours. « Les entreprises doivent investir dans un travail de transformation pour cela », explique le co-initiateur de l’étude. Car il existe des possibilités inexploitées. « Le potentiel de la réduction du temps de travail dort sous la complexité des procédures, des réunions et le faible recours à la numérisation », affirme le consultant.
Limites
Encourageante pour les partisans de la semaine de quatre jours, cette étude ne convaincra sans doute pas ses opposants, a fortiori en période de ralentissement économique et de manque de main-d’œuvre. Ses résultats ont d’ailleurs leurs limites. Ils dépendent des conditions dans lesquelles l’expérimentation a été menée, c’est-à-dire principalement dans des PME, et en laissant le choix aux entreprises de définir la durée et les modalités pratiques de la réduction de la durée du travail.
L’expérimentation n’avait pas pour objectif de promouvoir la mise en place de la semaine de quatre jours de manière globale et tous secteurs confondus, souligne Julia Brackmann. L’idée était seulement de tester « la possibilité d’un modèle de temps de travail innovant et son impact ».
A.L.