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Exposition : Gabriele Münter ou l’art du portrait
Vue de l’exposition « Gabriele Münter. Menschenbilder », présentée à Hambourg jusqu’au 21 mai 2023, © Bucerius Kunst Forum, Hambourg
Elle a été bien plus que la compagne de Vassily Kandinsky, auquel on l’associe souvent. Gabriele Münter (1877-1962) a été une très grande artiste expressionniste. Le Bucerius Forum de Hambourg révèle la stature méconnue de cette experte du portrait.
On réévalue aujourd’hui le rôle des femmes dans l’histoire de l’art. À Hambourg, le Bucerius Kunst Forum en donne un nouvel exemple jusqu’au 21 mai. Il braque ses projecteurs sur une artiste dont on avait sans doute mal évalué la stature : Gabriele Münter (1877-1962). L’artiste expressionniste sort de l’ombre de Vassily Kandinsky dont elle a été la compagne de 1902 à la Première Guerre mondiale. Elle a cofondé avec lui le mouvement du Cavalier bleu (Der Bleue Reiter). Mais son œuvre ne se réduit pas à cette période. L’exposition dévoile une artiste autonome et multifacettes, et une virtuose du portrait.
Variété de styles
L’exposition réunit près de 80 toiles, dessins, gravures, photos et peintures sur verre inversé. Ils couvrent la période allant de 1900 à 1940, et sont présentés chronologiquement en six chapitres : autoportraits, portraits, portraits contextuels, dessins, portraits d’enfants, portraits de groupe. L’ensemble s’intitule « Menschenbilder », c’est-à-dire littéralement « images de l’être humain ». C’est le terme qu’utilisait Gabriele Münter pour parler de ses toiles.
L’artiste en a un jour expliqué l’origine. « Dès l’enfance, j’avais souvent un crayon à la main, et je dessinais toujours des visages », a-t-elle dit. « Les autres enfants peignaient des histoires. Je n’essayais pas de représenter des événements ou des actions. Seule la permanence d’une apparition m’attachait aux gens, l’impression de la forme à travers laquelle son être s’exprime. »
Gabriele Münter n’en considérait pas moins l’art du portrait comme « la mission la plus hardie et la plus difficile, la plus spirituelle et la plus radicale pour l’artiste ». Pour la réaliser, elle a développé un vaste éventail de techniques et de styles.
Les plus connus sont les portraits expressifs et vibrants de couleurs peints avant la Première Guerre mondiale : celui de sa collègue Marianne von Werefkin, de Kandinsky devant une table à thé, du peintre Paul Klee dans un fauteuil ou d’une « jeune fille au ruban rouge ».
Mais cette incandescence typique de l’expressionnisme ne se retrouve pas dans tous les toiles. Gabriele Münter avait un goût prononcé pour l’expérimentation qu’elle exploité tout au long de son existence. On découvre ainsi à Hambourg des portraits réalisés dans le style opposé de la Nouvelle objectivité.
Dessins et photos : un versant méconnu de l’œuvre
Les dessins offrent une autre porte d’entrée dans l’univers de l’artiste. La virtuosité et l’économie du trait laissent sans voix. Ils révèlent une personnalité ou une atmosphère en trois coups de crayon. Gabriele Münter ne considérait d’ailleurs pas le dessin comme une préparation à la toile, mais comme un art à part entière.
Les photos, quant à elles, n’avaient jamais été présentées comme des œuvres en tant que telles. Sans doute à tort. Prises pour la plupart durant un voyage de deux ans et demi aux États-Unis (1898-1900), elles saisissent des scènes de la vie quotidienne dans la campagne ou dans des petites villes du Missouri, de l’Arkansas et du Texas : jeux d’enfants, fermière à la pompe à eau, pique-nique sur l’herbe, etc. Elles révèlent, elles aussi, un art maîtrisé du regard, de la composition, des situations et de la psychologie.
A.L.
Gabriele Münter. Menschenbilder
(Gabriele Münter. Images de l’être humain)
Exposition au Bucerius Kunst Forum de Hambourg jusqu’au 21 mai 2023