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Des scientifiques percent le mystère de la cité engloutie de Rungholt

Morceau de brique rouge attestant de l’existence de la cité de Rungholt, dans la mer des Wadden, au nord de l’Allemagne. Engloutie par un raz-de-marée en 1362, cette « Atlandide de la mer du Nord » est aujourd’hui entourée de légendes

Morceau de brique rouge attestant de l’existence de la cité de Rungholt, dans la mer des Wadden, au nord de l’Allemagne. Engloutie par un raz-de-marée en 1362, cette « Atlandide de la mer du Nord » est aujourd’hui entourée de légendes, © picture alliance / dpa | André Klohn

02.06.2023 - Article

Engloutie par un raz-de-marée en 1362, la cité médiévale de Rungholt est entourée de légendes. Son existence est avérée. Mais sa localisation dans la mer des Wadden est incertaine. Des scientifiques viennent d’annoncer une découverte qui « tranche un siècle de débats ».

Certains la surnomment « l’Atlantide de la mer du Nord ». La cité médiévale de Rungholt, au large des côtes de la Frise du nord (Schleswig-Holstein), fascine. Elle aurait été engloutie en janvier 1362 lors d’un raz-de-marée historique. Appelé « Grote Mandränke », la « grande noyade », ou le « raz de marée de Saint Marcel », l’événement aurait fait plusieurs milliers de morts.

Depuis 600 ans, l’existence de Rundholt est ainsi entourée de légendes. Au XVIe siècle, on racontait que le lieu, riche et prospère, aurait subi un châtiment divin pour corriger l’ivrognerie de ses habitants. Il se dit aussi qu’on entend résonner les cloches de son église depuis la mer des Wadden par temps calme. Elle a inspiré le poète Detlev von Lilienkron et l’écrivain Theodor Storm.

Au cours du dernier siècle, des documents médiévaux et des restes archéologiques attestant son existence ont été mis au jour. Mais quid de sa localisation ? Deux thèses s’affrontent depuis plusieurs décennies. Une équipe de chercheurs allemands vient d’annoncer une découverte qui pourrait, selon eux, « trancher un siècle de débats scientifiques ».

Traces d’un édifice religieux majeur

L’équipe rassemble les chercheurs de deux projets interdisciplinaires pilotés par l’Université Christian Albrecht de Kiel, l’Université Johannes Gutenberg de Mayence, l’Office archéologique du Schleswig-Holstein et le Centre d’archéologie baltique et scandinave.

Le 23 mai dernier, elle a annoncé avoir mis au jour au large de la Hallig de Südfall une chaîne de terps (élévations artificielles) médiévaux de deux kilomètres de long, encore inconnus. L’un de ces terps présente des structures qui sont, selon les archéologues, « à interpréter sans le moindre doute comme les fondements d’une église de 40 mètres sur 15 ». Des carottages et des fouilles ciblées ont, en effet, révélé des éléments quant à l’architecture et aux fondations de l’édifice.

« Cela classe la découverte parmi les grandes églises de Frise du Nord », analyse Bente Sven Majchczack, archéologue du pôle d’excellence ROOTS de l’Université de Kiel. « La particularité de cette découverte réside dans l’importance de cette église au centre du tissu de la cité », abonde Ruth Blankenfeldt, archéologue au Centre d’archéologie baltique et scandinave. « Par sa taille », il devait s’agir d’une « paroisse de rang supérieur. »

L’archéologue amateur Andreas Busch effectuant des mesures pour mettre au jour des restes de la cité de Rungholt. On lui doit de nombreuses découvertes. Il a estimé la population du lieu dans une fourchette située entre 1500 et 2000 habitants
L’archéologue amateur Andreas Busch effectuant des mesures pour mettre au jour des restes de la cité de Rungholt. On lui doit de nombreuses découvertes. Il a estimé la population du lieu dans une fourchette située entre 1500 et 2000 habitants© picture-alliance/ dpa | Horst Pfeiffer

Dans les années 1920, un archéologue amateur du nom d’Andreas Busch avait déjà mis au jour des traces de Rungholt en fouillant dans la mer des Wadden à marée basse : les pieux d’une écluse, des fontaines, des tombes, des restes de terps. Il avait réuni une grande quantité de documents (statistiques sur les raz-de-marée, cartes historiques, documents sur la construction des digues, etc.). Il avait estimé la population de la cité dans une fourchette située entre 1500 et 2000 habitants. Ce qui constitue un centre important pour l’époque.

Nouvelles méthodes de prospection

Les chercheurs d’aujourd’hui ont aussi eu à s’adapter à la contrainte des marées. Mais ils ont utilisé de nouvelles méthodes de prospection géophysique. Ces précédés permettent de voir les sédiments situés sous les anciennes cités. L’équipe a passé au peigne fin quelque dix kilomètres carrés. Ses découvertes sont le fruit de plusieurs années de travail.

Elles ne se limitent d’ailleurs pas à la mise au jour des restes d’un édifice religieux majeur.

Elles comprennent aussi la découverte de 54 terps, de systèmes complets d’évacuation de l’eau, d’une digue pourvue d’une porte à flots et les sites de deux églises plus petites. « La zone découverte doit être considérée comme l’un des grands centres connus du district médiéval de Edomsharde », concluent les chercheurs.

A.L.

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