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Dietrich Bonhoeffer : la foi au service de la résistance contre le nazisme

Le théologien Dietrich Bonhoeffer

Le théologien Dietrich Bonhoeffer, © picture alliance/dpa

17.04.2025 - Article

On ne peut pas être à la fois chrétien et national-socialiste. C’est guidé par ce principe que le pasteur Dietrich Bonhoeffer a vécu et lutté contre le régime nazi, jusqu’à son exécution au camp de concentration de Flossenbürg en avril 1945.

Incarnant un christianisme politiquement engagé, le théologien et résistant Dietrich Bonhoeffer compte parmi les personnalités les plus marquantes du XXe siècle. Né le 4 février 1906 à Breslau (aujourd’hui Wroclaw, en Pologne), il grandit avec ses sept frères et sœurs au sein d’une famille de la haute bourgeoisie. En 1912, le père, Karl Bonhoeffer, un professeur de psychiatrie, est nommé à l’hôpital de la Charité à Berlin et la famille s’installe dans une villa du quartier cossu de Grunewald. Les Bonhoeffer ayant peu d’affinités avec l’Église, le choix du plus jeune fils, Dietrich, d’étudier la théologie protestante après le baccalauréat ne manque pas de surprendre. Conformément aux attentes de la famille, le jeune homme aspire à une carrière universitaire. Il obtient son doctorat à 21 ans et devient, à seulement 24 ans, le plus jeune enseignant de la faculté de théologie. Plus tard, il regrettera son ambition démesurée et affirmera être devenu un bon théologien, mais pas un chrétien. Le changement qui va bientôt s’opérer en lui s’amorce à New York, où il passe une année au « Union Theological Seminary ». Il y apprend comment contribuer, en tant que chrétien, à résoudre des problèmes sociaux tels que la pauvreté et l’injustice.

Bloquer, si nécessaire, les rayons de la roue.
- Dietrich Bonhoeffer et la résistance de l’Église

À l’arrivée au pouvoir des nazis, Bonhoeffer met très tôt en garde contre les dangers que représentent le nouveau régime et le culte du Führer. Il n’accepte pas de se conformer à l’opinion largement répandue selon laquelle l’Église ne saurait s’immiscer dans la vie politique. Les lois antisémites imposées par les nazis, notamment le « paragraphe aryen », sont pour lui en effet incompatibles avec l’image de l’être humain véhiculée par la Bible. Convaincu qu’on ne peut être à la fois national-socialiste et chrétien, il refuse de reconnaître l’Église du Reich formée par le régime nazi ainsi que l’évêque placé à sa tête, Ludwig Müller. Lorsqu’un jour il réclame devant des pasteurs berlinois que l’Église « bloque si nécessaire les rayons de la roue », c’est-à-dire qu’elle s’engage dans une résistance politique, beaucoup quittent la salle.

Une figure de proue de l’Église confessante

Bonhoeffer apporte une contribution décisive à la création de l’« Église confessante », un mouvement de résistance au nazisme au sein des églises protestantes allemandes. Il déplore toutefois le manque de fermeté de cette église dissidente dans ses déclarations contre le « paragraphe aryen » et l’ambition d’Hitler d’exercer un pouvoir total. Il juge illusoire et dangereux de croire que l’Église puisse conserver son indépendance dans un système totalitaire. Lorsqu’il exige que tous les pasteurs opposés au régime se mettent en grève, il est mis à l’écart. Pour prendre du recul, il prend la direction de deux paroisses à Londres puis, à la demande de l’Église confessante, rentre en Allemagne pour y diriger un séminaire visant à préparer les futurs pasteurs à l’exercice de leur fonction. Ces séminaires faisaient figure de « centres de formation » des pasteurs partisans d’une résistance spirituelle au nazisme. L’enseignement de Bonhoeffer combine formation spirituelle, savoir théologique et éducation politique.

Un exil de courte durée à New York

De nouveaux décrets et loi entravent peu à peu le fonctionnement de ces séminaires, bientôt condamnés à la clandestinité. Bonhoeffer lui-même est de plus en plus étroitement surveillé par la Gestapo. Il est frappé d’une interdiction d’enseigner et de s’exprimer publiquement. Des amis, craignant son arrestation prochaine, le pressent de s’exiler aux États-Unis. Bonhoeffer s’y résout à contrecœur. Mais au bout de quelques semaines seulement, en juillet 1939, il quitte New York pour retourner dans son pays dirigé par les nazis, considérant qu’il n’a pas le droit de participer à la reconstruction de l’Allemagne s’il n’a pas partagé le sort de sa population.

Par son beau-frère Hans von Dohnanyi, il apprend les projets d’attentat contre Hitler et rejoint le groupe de résistance formé autour du major-général Hans Oster. Il est chargé d’utiliser ses contacts à l’étranger pour sonder la position des responsables politiques, surtout en Angleterre, au cas où Hitler serait éliminé et que le pouvoir serait renversé. C’est à ce moment que Bonhoeffer fait la connaissance de Maria von Wedemeyer, alors âgée de 18 ans. Tous deux se fiancent en secret. Le 5 avril 1943, Bonhoeffer est arrêté et conduit à la prison de Berlin-Tegel. La faiblesse des preuves réunies contre lui laisse espérer sa rapide libération. Mais suite à l’échec de l’attentat contre Hitler perpétré par le groupe de Claus von Stauffenberg, son implication dans les plans de renversement du régime est révélée.

Mort au camp de concentration de Flossenbürg

Après de lourdes attaques aériennes sur Berlin, Bonhoeffer est d’abord transféré dans les sous-sols de la prison de la Gestapo dans la Prinz-Albrecht-Straße, puis emmené au camp de concentration de Buchenwald. Il n’y reste que brièvement, avant d’être transporté avec d’autres prisonniers à travers le sud d’une Allemagne alors en pleine débâcle. Le groupe est hébergé provisoirement dans une école de la localité de Schönberg, dans la forêt bavaroise. Le lendemain matin, Bonhoeffer est emmené au camp de concentration de Flossenbürg. Il est interrogé pendant la nuit et condamné à mort par une cour martiale. Il est exécuté à l’aube du 9 avril 1945.

Sa famille et sa fiancée Maria von Wedemeyer n’apprendront la mort de Dietrich Bonhoeffer que fin juillet. On découvre également que son frère Klaus ainsi que ses beaux-frères Hans von Dohnanyi et Rüdiger Schleicher ont, eux aussi, été abattus ou pendus.

Récemment, des cercles de la droite radicale religieuse et politique ont tenté d’utiliser l’histoire de Bonhoeffer pour servir leurs objectifs. Or, la vie et les écrits du pasteur résistant montrent sans la moindre ambiguïté qu’il s’agit là purement d’une récupération qui dénature tout ce pour quoi le théologien a vécu et s’est battu.

© Traduction : deutschland.de / Révision : Ambassade d‘Allemagne

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