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Il y a 100 ans Thomas Mann publiait La Montagne Magique
[G.] L’écrivain allemand Thomas Mann (1875-1955) ; [Dr.] Première édition du roman « Der Zauberberg » (« La Montagne Magique »), publié il y a tout juste 100 ans, © picture-alliance / dpa | Bifab ; Éditions S. Fischer
Chef-d’œuvre de la littérature mondiale, le roman La Montagne Magique de Thomas Mann (1875-1955) célèbre cet automne le centenaire de sa parution. Lübeck, ville natale de l’auteur, consacre deux expositions à ce roman d’une actualité insoupçonnée.
Après le centenaire de la mort de Franz Kafka, en juin dernier, c’est un autre monument de la littérature germanophone qui est à l’honneur cet automne. Il y a 100 ans, en novembre 1924, paraissait le roman de Thomas Mann La Montagne Magique. La ville de Lübeck (nord de l’Allemagne), berceau de la famille Mann, consacre jusqu’au 2 mars 2025 deux expositions à ce chef-d’œuvre de la littérature mondiale.
Double exposition à Lübeck
La première propose une plongée dans l’univers du roman. Conçue par la Buddenbrock Haus, domicile de la famille Mann, elle est présentée au musée St. Annen de Lübeck, et s’intitule « La Montagne Magique. Hallucination et ivresse des hauteurs ». Elle présente les grands thèmes et les grands débats qui traversent le récit : la mort et la vie, le désir et l’amour, la guerre et la paix.
La Montagne Magique se déroule à la veille de la Première Guerre mondiale dans un sanatorium des Alpes suisses, le Berghof. Le théâtre du roman, écrit entre 1912 et 1923, a été inspiré à Thomas Mann par un sanatorium de Davos. Sa femme Katia y avait été soignée à cette époque.
Le récit a pour héros un jeune ingénieur de Hambourg, tout juste diplômé, dénommé Hans Castorp. Il est venu en visite pour trois semaines. Il va rester sept ans dans cet établissement fréquenté par les malades de la tuberculose de l’élite européenne. Ce séjour prolongé va le confronter aux grands débats de l’époque, ainsi qu’à toutes grandes les thématiques de l’existence.
L’exposition déroule un parcours en sept chapitres. Ils constituent autant de portes permettant d’entrer dans l’intimité de cette œuvre ambitieuse d’un millier de pages. La première étape est un détour par le cabinet de travail de Thomas Mann, exposant la genèse de l’œuvre. Elle frappe par la quantité de textes et de documents compulsés par l’auteur pour composer son livre à une époque, la Première Guerre mondiale et ses lendemains, marquée par de profonds bouleversements.
Parallèles entre hier et aujourd’hui
Le parcours mène ensuite à une réflexion sur les techniques médicales modernes, dont le roman reflète l’expansion, du diagnostic à la thérapie. Il s’intéresse aussi au mythe du « bon air des Alpes suisses », tel qu’il fut vanté jadis pour combattre le mal des montagnes. L’exposition présente du matériel médical de l’époque, une manière de rendre tangible l’univers du roman, mais aussi de souligner la parenté entre hier et aujourd’hui.
Les quatre chapitres suivants sont consacrés à la vie intérieure et intime de Hans Castorp. Ils déroulent les grandes thématiques de l’œuvre : la finitude, la mort, l’érotisme, le désir, la vie sociale, la violence et finalement la quête de sens.
On retrouve les personnages du roman : la voluptueuse Clawdia Chauchat, les infatigables Lodovico Settembrini et Léon Naphta, incarnant deux positions intellectuelles et politiques opposées, les médecins de l’institution. Ils composent une sorte de microcosme de la société du temps. Ils nous apparaissent plus proches qu’on ne l’aurait imaginé. Les parallèles avec notre époque de bouleversements sont multiples.
« La Montagne Magique a beau avoir un siècle, elle n’a rien perdu de sa fraîcheur, ni de sa pertinence », souligne Caren Heuer, l’une des commissaires de l’exposition. « Il nous importait de mettre en avant la modernité du texte, qui réside dans le fait qu’il aborde les thèmes et les questions qui travaillent l’Humanité depuis l’aube des temps. »
L’exposition s’achève, comme le roman, sur le début de la guerre et sur la violence. « Ce festival mondial de la mort débouchera-t-il sur une montée de l’amour ? » : telle est la question posée au visiteur, qui est libre d’apporter sa propre réponse.
Pour ce faire, il pourra faire un détour par le musée voisin de la Kunsthalle. L’artiste britannique Heather Phillipson y propose l’ascension de La Montagne Magique par un autre versant : celui de l’art contemporain. Elle mêle la vidéo, la sculpture, la musique, l’écrit et le dessin au sein de vastes installations multimédia, qui ouvrent des portes variées sur l’œuvre. L’exposition s’intitule « Extra Time ». Elle se visite également jusqu’au 2 mars 2025.
A.L.
Der Zauberberg. Fiebertraum und Höhenrausch
(La Montagne Magique. Hallucination et ivresse des hauteurs)
Et
Extra Time
Expositions au musée St. Annen et à la Kunsthalle de Lübeck jusqu’au 2 mars 2025