Bienvenue sur les pages du Ministère fédéral des Affaires étrangères
Il y a 375 ans, la Paix de Westphalie
La proclamation de la paix à Münster, 1648 / Luyken Guerre de Trente Ans 1618-1648 /Source : H.Ludolff, Historische Schaubühne, Francfort/M., 1718. Colorisation ultérieure, © picture alliance / akg-images | akg-images
Le 24 octobre 1648, les traités de Westphalie mettaient fin à la guerre de Trente Ans en Europe. Les villes de Münster et d’Osnabrück célèbrent cette semaine le 375e anniversaire de ce premier grand congrès de la paix, qui a marqué l’histoire européenne.
Le diplomate italien Alvise Contarini les a qualifiés de « miracle mondial ». Le 24 octobre 1648, les traités de Westphalie étaient signés à Münster (Rhénanie-du-Nord-Westphalie) et à Osnabrück (Basse-Saxe). Le lendemain, la paix était proclamée sur les marches de l’hôtel de ville d’Osnabrück. Les traités mettaient un terme à la guerre de Trente Ans (1618-1648) en Europe. Ils marquaient l’achèvement des guerres de religion en Allemagne et inauguraient pour 150 ans un nouvel ordre de paix européen. Les villes de Münster et d’Osnabrück célèbrent cette semaine les 375 ans de cet événement historique.
C’est l’apogée d’une année de commémorations, qui a débuté le 15 mai. À Münster, le programme prévoyait des débats sur le thème de « la paix par-delà les frontières » et des vêpres œcuméniques axées sur la « résolution pacifique des conflits ». Un « livre pour la paix » (« Book of Peace ») a été ouvert dans la salle de l’hôtel de ville qui a vu la signature du traité. Un « Sommet de la paix de Westphalie » (Westphalian Peace Summit) s’est, par ailleurs, tenu, avec la participation de la Prix Nobel de la Paix libérienne Leymah Gbowee. Une cérémonie en plein air sur la place du marché et un son et lumière de l’artiste Michael Batz intitulé « Longing for Peace – Sehnsucht nach Frieden » a enflammé sur les maisons à colombages.
Un entrelacs de conflits insolubles
Un miracle, les traités de Westphalie l’ont sans aucun doute été pour les contemporains. Conflit aux origines multiples, marqué notamment par l'affrontement entre protestantisme et catholicisme et par la tension entre féodalité et absolutisme, la guerre de Trente Ans a déchiré l’Europe de 1618 à 1648. Elle a débuté par un événement relativement anodin, la défenestration de Prague, le 23 mai 1618. Puis elle s’est rapidement muée en un entrelacs de quatre guerres mettant aux prises l’empereur du Saint-Empire, Ferdinand III, les États impériaux et des États étrangers dont la Suède et la France.
Les historiens estiment que la guerre de Trente Ans a décimé directement ou indirectement (famines, épidémies, etc.) sept millions de personnes, soit environ le tiers de la population européenne. Le poète Andreas Gryphius (1616-1664) en a dressé le tableau apocalyptique dans un célèbre recueil intitulé « Les larmes de la patrie » (1636) : « Nous voici dévastés, / Ruinés, et plus encore !/ Les cohortes impies, / La trompette furieuse,/ L'épée grasse de sang, / Le canon rugissant, / Ont réduit à néant / Le fruit de tant d'efforts et de tant de sueur. (…) »
Le premier congrès de paix européen
Des tentatives de règlement du conflit ont été entreprises en 1629, à Lübeck, et en 1635, à Prague. Elles ont échoué, tant le maillage des intérêts était complexe et confus. Ce n’est qu’en 1637 qu’a émergé l’idée d’un « congrès de paix universel », qui prenne en considération les intérêts de toutes les parties prenantes.
Ce fut le premier congrès de paix européen. Il devait servir de modèle dans l’histoire européenne. Mais il a fallu plusieurs années pour qu’il puisse voir le jour. En 1641, les partis se sont d’abord accordés pour organiser la négociation dans les villes de Münster et d’Osnabrück. S’en sont suivies d’interminables discussions sur les questions protocolaires. Les pourparlers de paix ont effectivement débuté en juin 1643, puis les négociations directes en juin 1645. Deux négociations se sont déroulées en parallèle : entre les représentants de l’empereur, les États du Saint-Empire et la Suède à Osnabrück, et entre l’empereur et la France à Münster.
Un jalon dans l’histoire de l’Europe moderne
Elles ont abouti à la Paix de Westphalie, qui est entrée dans l’histoire à plusieurs titres. Les traités ont pacifié une Allemagne et une Europe exsangues. Ils ont mis un terme aux conflits confessionnels et religieux en Allemagne. Et ils ont instauré un ordre constitutionnel qui devait durer jusqu’à la fin du Saint-Empire, en 1806. Le Saint-Empire a donné des territoires à la France (Alsace) et à la Suède. Deux États ont conquis leur souveraineté dans le cadre des négociations et de leurs compléments : les Pays-Bas et la Confédération helvétique.
Enfin, sur le plan du droit international alors émergeant, les traités de Westphalie ont vu la consécration du principe d’égalité des États souverains, quelle que soit leur puissance et leur taille. Ce système, que la science politique a qualifié de « système westphalien », a marqué la naissance de l’Europe politique moderne.
A.L.