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Les archives de Marbach consacrent une exposition au dramaturge Botho Strauss
Dörte Lyssewski et Robert Hunger-Bühler sur la scène du Burgtheater de Vienne (Autriche) dans la pièce « Das blinde Geschehen » du dramaturge allemand Botho-Strauss (2011), © picture alliance / dpa | Hans Klaus Techt
Observateur acéré d’un monde en décomposition, écrivain au style ciselé, il est l’un des dramaturges contemporains les plus joués en Allemagne. Botho Strauss a fêté le 2 décembre ses 80 ans. Les Archives littéraires allemandes de Marbach lui consacrent une exposition.
« Depuis toujours et dès l’origine, mon travail a été lié à la décision de n’être en tant qu’écrivain personne d’autre que celui qui écrit ». Parmi les plumes allemandes contemporaines, Botho Strauss est un écrivain à part. Il vit retiré entre les lacs et les forêts de l’Uckermarck, l’une des régions les moins peuplées d’Allemagne, au nord-est de Berlin. Ses interviews sont rares. Il évite les apparitions publiques. Pourtant, le dramaturge qui a fêté lundi son 80e anniversaire, est l’un des auteurs les plus joués de la scène contemporaine allemande et européenne. Le musée littéraire de la modernité des Archives littéraires allemandes de Marbach lui consacre une exposition.
Elle s’intitule « Collectionneur d’attitudes – Continuateur textuel – faiseur de phrases. Botho Strauss en trois actes ». Elle rassemble jusqu’au 16 février 2025 une soixantaine d’objets issus des archives personnelles du dramaturge, essayiste et romancier. Le germaniste Philipp Theisohn, qui vient de publier un essai très personnel sur Botho Strauss (Denken nach Botho Strauss. Begegnungen in einer anderen Zeit, Matthes & Seitz Verlag, novembre 2024) était présent lors de l’inauguration, aux côtés de la directrice de Archives, Sandra Richter, et des commissaires, Ulrich von Bülow et Vera Hildenbrandt.
Gloire sur les planches
L’exposition met en scène les visages de l’écrivain à la manière d’une pièce de théâtre. Le premier acte (« Collectionneur d’attitudes ») évoque ses débuts. Botho Strauss commence sa carrière comme critique de théâtre pour la revue Theater Heute. De 1970 à 1975, il est engagé à la Schaubühne de Berlin. Il travaille comme dramaturge sous la direction de Peter Stein. Il traduit ou adapte Ibsen, Labiche, Gorki.
Puis il écrit ses propres pièces. Elles traitent de la solitude et de l’incommunicabilité entre les êtres sur fond de décomposition de la société. Il devient une vedette des planches dans les années 1970 et 1980. Il décroche de prestigieux prix littéraires, dont le Prix Jean-Paul (1987) et le prix Georg Büchner (1989).
L'exposition lève un coin du voile sur l’atelier de cet observateur grinçant au verbe pétillant. On y découvre des manuscrits de la Trilogie du Revoir. Les hommages rédigés à l’attention des comédiens Bruno Ganz et Jutta Lampe donnent un aperçu de sa conception de l’art dramatique.
Puis le rideau s’ouvre sur un deuxième acte. Il présente le « continuation textuel ». L’expression est de Botho Strauss lui-même. L’exposition décrit un arpenteur de l’histoire littéraire capable de choisir ses lectures à l’encontre des canons de la littérature. Botho Strauss réfléchit sur les œuvres de Rudolf Borchardt, Gottfried Benn, Ernst Jünger, Konrad Weiss, Martin Heidegger et Paul Celan. C’est à leur contact qu’il se forge ce rôle de « continuateur ».
Une écriture réflexive et critique
Le troisième acte présente un visage différent encore, celui du prosateur. Un « faiseur de phrases » acérées, qui n’a pas peur de se montrer inactuel, misanthrope, provocateur ou marginal dans ses essais et ses romans. Botho Strauss a rencontré la saveur du succès, mais aussi la morsure de la critique. L’exposition montre à travers différentes versions de ses textes Der junge Mann (Le jeune homme) et Die Unbeholfenen, l’élaboration de sa prose sur un mode réflexif. Les mots, les phrases émergent à la manière d’un commentaire critique du monde contemporain qui ne cesse de provoquer des débats.
A.L.