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80 ans après, le bombardement de Dresde brûle les planches

La pièce Der Komet, adaptée d’un roman de Durs Grünbein par Tilmann Köhler, Uta Girod et le Spielensemble, est actuellement à l’affiche au théâtre Schauspiel Dresden

La pièce « Der Komet », adaptée d’un roman de Durs Grünbein par Tilmann Köhler, Uta Girod et le Spielensemble, est actuellement à l’affiche au théâtre Schauspiel Dresden. De g. à dr. : Matthias Reichwald, Henriette Hölzel, Anna-Katharina Muck, Karina Plachetka, Christine Hoppe, Sven Hönig, Marin Blülle, © Schauspiel Dresden / Sebastian Hoppe

11.02.2025 - Article

Tilmann Köhler met en scène au Staatsschauspiel de Dresde « Der Komet ». Cette adaptation du roman éponyme de Durs Grünbein offre un portrait de Dresde sous le nazisme. Elle s’achève sur le bombardement allié qui détruisit la ville en février 1945, il y a tout juste 80 ans.

Dresde, au lendemain des bombardements alliés des 13 et 14 février 1945. La vieille ville a été presque entièrement détruite, y compris les monuments et un tiers des logements. Les historiens estiment à 25 000 le nombre de personnes tuées
Dresde, au lendemain des bombardements alliés des 13 et 14 février 1945. La vieille ville a été presque entièrement détruite, y compris les monuments et un tiers des logements. Les historiens estiment à 25 000 le nombre de personnes tuées © picture alliance / dpa | dpa

Du 13 au 15 février 1945, les avions alliés détruisaient la vieille ville de Dresde et des milliers de logements dans un déluge de feu et d’acier. Selon les historiens, 25 000 personnes perdirent la vie dans cette apocalypse, restée dans les mémoires comme l’un des moments les plus intenses de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Quatre-vingt ans après, Dresde s’apprête à commémorer ce tournant de son histoire. Mais la réflexion a aussi lieu sur les planches. Tilmann Köhler met en scène au Staatsschauspiel Dresden une adaptation du roman de Durs Grünbein, Der Komet.

La grande Histoire au prisme de la petite

Ce succès d’édition, sorti en 2023, dresse un portrait subtil de Dresde sous le nazisme avant de raconter son effondrement en février 1945. L’auteur est poète, essayiste et lauréat du Prix Büchner. Il est natif de Dresde. Très attaché à sa ville, il en connaît les beautés, les blessures et aussi les ambivalences.

Son roman évoque la grande histoire par le prisme de la petite. Durs Grünbein fait revivre Dora W., sa grand-mère. Née en 1920, elle a grandi en Silésie, dans une famille d’humbles bergers. Au début des années 1930, elle rencontre Oskar, compagnon aux abattoirs de Dresde. Elle le rejoint dans cette ville de Saxe « polie comme de la porcelaine ». La jeune bergère est émerveillée par l’étalage de trésors baroques qui l’entoure. Le couple travaille, a deux filles, noue des amitiés. Dora et Oskar vivent leur « âge d’or » au moment où l’Allemagne sombre dans la dictature nazie. Quand la guerre éclate, ils sont rattrapés par l’Histoire. Oskar est mobilisé sur le front de l’Est, dont il ne reviendra pas. Dora et ses filles survivent de justesse à l’enfer des flammes qui les engloutit en février 1945.

Dans son roman, Durs Grünbein décrit « les tentacules d’un ordre qui pénétrait dans chaque foyer ». Il montre comment la mise au pas, la militarisation et l’endoctrinement nazis ont peu à peu empoisonné le climat et les relations humaines dans la ville fanatisée. Il dépeint la nuit du 13 au 14 février 1945 comme la conséquence des crimes du fascisme allemand, d’un « ordre, créé comme pour l’éternité, tellement puissant par son organisation qu’il ne pouvait être ramené à la réalité que de l’extérieur, depuis le ciel, par des tapis de bombes… »

La tragédie du nazisme vécue de l’intérieur

La pièce transpose le récit sur les planches. Plus encore que le roman, elle se concentre sur les personnages et sur leur vécu. Sept comédiens se partagent la scène. Leurs rôles apparaissent relativement mouvants. Ils évoluent sur un plancher incliné. Le quadrillage, au sol, évoque un plan de Dresde.

La musique est minimale. Les dialogues sont peu étoffés. Tilmann Köhler mise sur une économie de moyens et privilégie le théâtre parlé. Il laisse de côté les passages du livre qui tendent davantage vers l’essai. Sa mise en scène paraît humaine, proche et chaleureuse. Lors de la première, le 27 janvier, la pièce a été applaudie par le public.

A.L.

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