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« Toute guerre entre la France et l'Allemagne deviendra matériellement impossible »
Trois des « pères fondateurs » de l’Europe : Robert Schuman, ministre français des Affaies étrangères (de face), aux côtés du chancelier allemand Konrad Adenauer (à g.) et du Premier ministre italien Alcide de Gasperi (a dr.) en 1951., © picture alliance
Il y a 70 ans, la déclaration Schuman posait les bases de l’unification européenne. C’était le 9 mai 1950, cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Comment éviter la répétition de l’histoire ? Comment bâtir une paix durable dans une Europe meurtrie par les conflits et ravagée par deux guerres mondiales ? Le 9 mai 1950, le ministre français des Affaires étrangères Robert Schuman a proposé une voie nouvelle. Elle consistait à mettre en commun des intérêts industriels concrets pour nouer entre les pays européens, notamment la France et l’Allemagne, des relations basées sur la solidarité. Soixante-dix ans plus tard, ce texte est considéré comme l’acte fondateur de l’intégration européenne.
La CECA
Robert Schuman (1886-1963) a prononcé sa déclaration dans le salon de l’Horloge, au Quai d’Orsay, à Paris. Il offrait de « placer l'ensemble de la production franco-allemande de charbon et d'acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d'Europe ».
« La solidarité de production qui sera ainsi nouée », ajoutait-il, « manifestera que toute guerre entre la France et l'Allemagne devient non seulement impensable, mais matériellement impossible ».
« L'établissement de cette unité puissante de production ouverte à tous les pays qui voudront y participer (…) jettera les fondements réels de leur unification économique ».
À Bonn, le chancelier Konrad Adenauer réserva immédiatement un accueil enthousiaste à la proposition française. Six pays participèrent à l’entreprise. Elle déboucha, le 18 avril 1951 sur la signature du traité de Paris, et le 23 juillet 1952 sur la création de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier ou CECA.
Laboratoire de la construction européenne
La CECA était la première organisation internationale fondée sur des principes supranationaux. Elle disposait d’institutions dont une Haute Autorité, un Conseil des ministres, une assemblée commune et une Cour de justice. Elle fut une réussite économique et politique. Mais elle fut bien davantage : un laboratoire de l’Europe.
Elle inaugura ce que l’on a appelé par la suite la « méthode communautaire ». C’est une démarche des petits pas visant à créer des solidarités concrètes dans des domaines limités pour installer un climat de dialogue et de coopération entre les États européens. Elle a propulsé toute l’intégration européenne des années 1950 à nos jours.
Ainsi, quatre ans après la CECA, ses pays fondateurs (France, Allemagne, Benelux, Italie) portaient à Rome sur les fonts baptismaux la CEE (Communauté économique européenne), l’ancêtre de l’Union européenne (UE).
« L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait », avait dit Robert Schuman. Sa méthode était celle d’un visionnaire qui avait tiré les leçons de l’histoire.
« Homme de la frontière »
Homme de paix, Européen fervent, Robert Schuman avait longuement médité sur les échecs des tentatives passées d’unification européenne. De fait, il se définissait comme « un homme de la frontière ». Son père, un Lorrain né français, était devenu allemand en1870. Sa mère était luxembourgeoise. Lui-même avait été formé à l’université allemande. Puis, il avait fait une carrière politique en France jusqu’à devenir président du Conseil.
Personne ne savait mieux que lui que « le rassemblement des nations européennes exige que l'opposition séculaire de la France et de l'Allemagne soit éliminée ». Mais il savait aussi qu’il fallait pour cela dépasser des intérêts et des perceptions souvent divergents.
« L’Europe ne se fera pas en un jour, sans heurts. Rien de durable ne s’accomplit dans la facilité », a-t-il écrit en 1962 dans son livre-testament, « Pour l’Europe ». Mais pour lui comme pour Konrad Adenauer, une autre figure du catholicisme rhénan devenu l’un des « Pères de l’Europe », « les frontières qui nous séparent (…) ne doivent pas être une barrière entre les peuples, entre des hommes qui, en fin de compte, n’ont jamais été à l’origine des conflits. »
Des réflexions qui continuent d’inspirer citoyens et dirigeants européens jusqu’à aujourd’hui.
A.L.
Plus d’informations :
Fondation Robert Schumann (en fancais)