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Déclaration commune des ministres chargés des affaires européennes du Triangle de Weimar
Les ministres des Affaires étrangères de l'Allemagne, de la France et de la Pologne (Triangle de Weimar) se sont rencontrés le 16 septembre 2022 à l'Abbaye d’Eberbach en Allemagne.
Face aux grands défis que nous devons relever, nous, ministres des Affaires européennes de la France, de l’Allemagne et de la Pologne réaffirmons notre engagement commun d’assumer nos responsabilités, de promouvoir les réponses aux préoccupations de nos concitoyens, de renforcer la résilience de l’Union européenne (UE) et de sécuriser notre avenir européen commun reposant sur les valeurs fondatrices communes de l’UE.
La guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine est une attaque brutale contre la paix et la sécurité en Europe, contre notre modèle européen reposant sur la liberté, la démocratie et un ordre fondé sur des règles de droit. La réaction ferme et unie de l’Union européenne et de ses États membres, avec la condamnation de la guerre, l’accueil des réfugiés, l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de la Russie et le soutien fourni à l’Ukraine notamment sous la forme d’une aide militaire conséquente, a été et demeure essentielle. Il est vital de poursuivre dans cette voie car l’aide européenne est essentielle pour permettre à l’Ukraine de continuer à défendre sa souveraineté et les valeurs européennes. Nous reconnaissons que pour soutenir les forces ukrainiennes à long terme, il faut aller au-delà de la fourniture d’équipement, notamment en mettant en place une mission dédiée de formation et d’assistance européenne, à l’intérieur de l’UE, au profit des forces ukrainiennes, afin d’assurer également la maintenance et la réparation de l’équipement militaire.
La France, l’Allemagne et la Pologne réaffirment également leur soutien à la procédure judiciaire menée par l’Ukraine contre la Fédération de Russie, notamment en intervenant dans la procédure intentée par l’Ukraine devant la Cour internationale de Justice en vertu de la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, qui cherche à établir que la Russie ne s’appuie sur aucune base légale dans son action militaire contre l’Ukraine menée sous le faux prétexte d’allégations de génocide. En outre, la Russie utilise la famine comme arme et prend en otage le monde entier avec la crise alimentaire qu’elle a provoquée et exacerbée. Nous soutenons fermement l’initiative de l’UE de créer des « Corridors de solidarité » qui permettent l’exportation de céréales ukrainiennes et d’autres produits et nous saluons l’engagement spécifique de tous les États membres de l’UE voisins de l’Ukraine à cet égard. La France, l’Allemagne et la Pologne réaffirment qu’elles se tiennent fermement aux côtés de l’Ukraine et qu’elles continueront d’apporter un appui résolu à la résilience économique, militaire, sociale et financière globale de ce pays. Le mécanisme de protection civile de l’Union européenne s’est révélé être un outil important pour la coordination de l’aide et l’unité de l’action au-delà de ses frontières. Nous restons déterminés à maintenir notre aide humanitaire en faveur du peuple ukrainien. Alors que la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine constitue un tournant fondamental dans les relations entre l’UE et la Russie, nous devons redéfinir les principes directeurs clés de la politique de l’Union européenne envers la Russie. Nous préconisons également une approche stratégique associant nos partenaires internationaux pour assurer la reconstruction de l’Ukraine de manière concertée et durable. Nous nous réjouissons de l’accord trouvé par les ministres des Finances de l’UE pour fournir un paquet supplémentaire d’assistance macrofinancière d’un montant de 5 milliards d’euros, qui manifeste clairement la volonté constante de l’UE de soutenir la résilience de l’Ukraine, et nous appelons à intensifier encore notre action pour parvenir rapidement à un accord sur le solde de l’engagement du Conseil européen, qui s’élève à 9 milliards d’euros.
En outre, nos pays sont convaincus que nous devons unir nos efforts pour permettre à l’Union européenne de défendre nos valeurs fondamentales et de garantir notre stabilité face aux attaques extérieures. Se référant aux conclusions du Conseil européen en date des 23 et 24 juin 2022, qui a reconnu la perspective européenne de l’Ukraine, de la République de Moldavie et de la Géorgie et décidé d’accorder le statut de pays candidat à l’Ukraine et à la République de Moldavie, la France, l’Allemagne et la Pologne déclarent conjointement que l’élargissement de l’Union européenne est un élément important à cet égard. Nous avons donc discuté des moyens de soutenir ces pays sur la voie de la réforme leur permettant de remplir les critères de Copenhague. Nous sommes convenus également de la nécessité de continuer à réfléchir aux réformes internes et aux solutions de compromis pour garantir la capacité de l’Union européenne à maintenir et accélérer son propre développement. Dans ce contexte, nous considérons qu’il convient d’assurer le suivi et de discuter des propositions finales de la Conférence sur l’avenir de l’Europe. La France, l’Allemagne et la Pologne attachent une grande importante à l’intégrité des élections nationales et européennes et à l’amélioration de la résilience face à la désinformation et aux ingérences étrangères. C’est pourquoi nous soutenons la proposition de la Commission relative à un règlement sur la transparence et ciblant la publicité politique. Nous soutenons également la mise en place d’une loi électorale cohérente pour les prochaines élections européennes en 2024.
Nous réaffirmons notre attachement total et sans équivoque à la perspective de l’adhésion à l’Union européenne des six pays des Balkans occidentaux. La France, l’Allemagne et la Pologne se félicitent des progrès accomplis dans le processus d’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du Nord. Nous sommes prêts à soutenir les processus de réforme dans la région, où il est important de progresser notamment dans les domaines de l’état de droit et de la lutte contre la corruption, ainsi que dans la réconciliation et le règlement des différends bilatéraux et régionaux qui subsistent. Nous sommes préoccupés par la crise politique en Bosnie-Herzégovine et nous appelons toutes les parties à garantir des élections libres et régulières le 2 octobre 2022. Nous soutenons sans réserve le dialogue entre le Kosovo et la Serbie sous l’égide de l’UE et nous soulignons la nécessité d’un accord global qui permette au Kosovo et à la Serbie de progresser sur leurs voies européennes respectives et de contribuer à la stabilité de la région. Nous appelons de nos vœux des progrès concernant la libéralisation des visas au Kosovo. Nos pays sont fermement attachés au processus de Berlin comme moyen supplémentaire d’encourager la coopération régionale et l’adhésion des pays des Balkans occidentaux à l’UE ; nous soulignons combien il est important de mettre en œuvre la décision historique des six pays des Balkans occidentaux de créer un marché commun régional. Compte tenu de l’importance que nous attachons à cette région, et pour manifester notre soutien commun, nous avons décidé d’effectuer une visite trilatérale dans la région et nous préconisons de continuer à renforcer les liens entre l’UE et les Balkans occidentaux.
La France, l’Allemagne et la Pologne sont d’accord sur le fait que la promotion d’un espace plus large de stabilité et de prospérité économique et que le renforcement de la résilience en Europe sont prioritaires pour l’UE. Par conséquent, nous nous félicitons de l’objectif visant à favoriser le dialogue politique et la coopération dans le cadre d’une Communauté politique européenne qui constituerait une plateforme plus large permettant aux pays européens de répondre aux questions d’intérêt commun sur le continent européen, tel qu’il en a été discuté lors du Conseil européen du 23 juin 2022.
Tout en réaffirmant que ce cadre ne se substituera pas au processus d’élargissement de l’UE ni aux institutions, alliances et plateformes existantes en Europe, nous nous réjouissons de poursuivre cette discussion stratégique avec nos partenaires européens et de la tenue d’une première réunion le 6 octobre 2022 à Prague.
La guerre d’agression menée par la Russie et son instrumentalisation de l’énergie comme arme géopolitique, notamment l’arrêt ou la réduction drastique des fournitures de gaz à certains États membres, ont engendré des inquiétudes dans toute l’UE concernant une éventuelle pénurie de gaz doublée d’une forte augmentation des prix de l’énergie. Nous sommes convaincus qu’il est de plus en plus urgent d’assurer la sécurité de l’approvisionnement de nos pays, le coût abordable de l’énergie pour les citoyens et les économies et la transition climatique et énergétique conformément à l’Accord de Paris.
La France, l’Allemagne et la Pologne conviennent qu’il faut unir nos efforts, y compris pour contrecarrer la désinformation russe quant à l’origine de la crise, et nous plaidons pour l’adoption d’une approche concertée basée sur l’esprit de solidarité européenne et visant à trouver une solution efficace à cette problématique majeure et immédiate à laquelle nos économies et sociétés font face.
Nous, ministres chargés des Affaires européennes de la France, de l’Allemagne et de la Pologne, souhaitons que le triangle de Weimar, créé afin de renforcer les liens entre nos peuples et nos pays dans l’ensemble des aspects de la vie et de promouvoir des structures communes durables en Europe, soit une force motrice pour élaborer des réponses aux problématiques auxquelles l’Europe fait face actuellement à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières.
Nous continuerons donc à nous concerter étroitement sur le plan politique et nous attendons avec intérêt la prochaine réunion. Nous nous efforcerons d’intensifier la coopération entre nos sociétés civiles, en particulier entre les jeunes de nos trois pays, ainsi que des échanges entre jeunes diplomates, des projets culturels et des projets européens portant sur un travail de mémoire et de réconciliation. Nous nous engageons à soutenir la coopération décentralisée et nous nous félicitons du fait que la coopération entre nos villes et communautés dans le cadre du format de Weimar connaît un nouvel élan avec l’arrivée de réfugiés ukrainiens. Nous encourageons les réunions au format de Weimar rassemblant jeunes et réfugiés ukrainiens organisées sur nos territoires pour échanger sur des thèmes européens tels que l’adhésion de l’Ukraine à l’UE.
© Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères